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Marie-Pierre RAMOS
29 octobre 2008

Note sur l'emploi - Octobre 2008 : de sombres perspectives

La crise financière de septembre est mise en avant par le gouvernement et le Président de la République pour expliquer la dégradation de l’emploi. Cependant, la remontée du chômage et les destructions d’emplois ont débuté avant que la crise financière ne prenne de l’ampleur.

Une dégradation de l’emploi antérieure à la crise financière

La politique menée par la droite a été incapable de dynamiser les créations d’emploi. En effet, elles ont été nettement inférieures sur la période 2002–2007, où elles ont progressé de 4%, que sur la période 1997-2002, où la progression a été de 14%.

Une année 2008 marquée par une remontée du chômage…

La remontée du chômage a lieu dans un contexte démographique pourtant favorable. La population active n’augmente plus que de 20 000 personnes par trimestre contre environ 80 000 au début de la décennie.Les premiers signes de dégradation de l’emploi sont apparus dès le premier trimestre 2008, soit bien avant la crise financière de septembre. Ainsi, le nombre des inscriptions en catégorie 1 enregistré à l’ANPE au cours du premier trimestre 2008 a augmenté de 4,1% par rapport aux trois mois précédents. Notamment, les entrées liées à un licenciement économique ont particulièrement augmenté (+2%), signe de difficultés du secteur productif. Les sorties de l’ANPE au cours du premier trimestre n’augmentent elle que de 0,7% et sont même en baisse sur un an (-4,4%). En août, le chômage est ensuite reparti fortement à la hausse, après être remonté de 0,2% en juin. L’augmentation de 2,2% du nombre de chômeurs au mois d’août par rapport à juillet, soit 41 300 chômeurs de plus, a même été la plus forte depuis 1993. Le nombre de demandeurs d’emploi de catégorie 1 a augmenté de 2,2 % et celui des catégories 1, 2, 3 hors activité réduite de 1,5 % selon la DARES. La dégradation de l’emploi affecte en priorité les populations les plus exposées, c’est-à-dire les chômeurs de longue durée et les salariés les plus âgés. Ce sont ainsi les chômeurs de longue durée qui connaissent la dégradation la plus forte (+3,4% pour ceux inscrits depuis plus d’un an et +3,8% pour ceux inscrits depuis plus de deux ans) et les seniors de plus de 50 ans (+2,9%). Compte tenu de ces évolutions, l’Unedic anticipe une progression du chômage cette année (+46 000 chômeurs) et pour 2009 (+41 000), sans aucune création d’emploi. Le taux de chômage atteindrait 7,4% en fin d’année, contre 7,2% actuellement selon l’Insee.

… Et des destructions de postes massives

La remontée du chômage s’explique en grande partie par des destructions de postes massives dans le secteur industriel et par un fort ralentissement des créations de postes dans les autres secteurs. L’emploi salarié non agricole a en effet reculé au cours du deuxième trimestre 2008, 29 000 postes ont été détruits. Les sorties de l’ANPE au cours des trois derniers mois ont baissé de 1,9% par rapport aux trois mois précédents. Les sorties pour reprise d’emploi déclarée diminuent de 4,8%. Tous les secteurs sont concernés par les réductions d’effectifs ou du moins le ralentissement des créations de postes :

  • Dans l’industrie, la baisse des effectifs se poursuit : -0,4% (soit 15 000 postes), après -0,3% au 1er trimestre 2008.

  • Dans la construction, les créations d’emploi ralentissent nettement : +0,3% après +0,8% au 1er trimestre 2008.

  • Dans le tertiaire marchand, les effectifs se réduisent de 0,2 % (-18 000 postes). Un tel repli n’avait pas été enregistré depuis le début des années quatre-vingt-dix. Il résulte principalement de la très forte baisse de l’intérim ce trimestre (-7,3 % soit -48 500 postes). Hors intérim, l’emploi dans les services aux entreprises a continué de progresser mais à un rythme moindre (+ 8 000 postes au deuxième trimestre après +15 000 au premier).

Le secteur privé non marchand a également vu le nombre de créations de postes ralentir, passant de 13 000 postes créés au premier trimestre, à 10 000 postes supplémentaires au deuxième trimestre. Un tel repli n’avait pas été enregistré depuis le début des années quatre-vingt-dix. Au total selon la DARES, l’emploi dans l’ensemble de l’économie se serait replié de 45 000 postes au deuxième trimestre. Selon l’Insee, au second semestre, l’emploi salarié marchand perdrait environ 100 000 postes et l’emploi total 52 000 postes. Sur l’année, 37 000 emplois uniquement seraient créés, contre 359 000 en 2007.

Dans un contexte de précarité croissante

Les contrats temporaires et le sous-emploi n’ont cessé de croître depuis les années 1990. Selon les données de l’OIT, les emplois à temps partiel sont passés de 13% de l’emploi total en 1991 à 17% en 2006 et les contrats temporaires de 8% à 12% sur la même période. Parallèlement au développement du temps partiel, le taux de sous-emploi s’est accru modérément, mais constamment, depuis 2003 selon l’Insee, passant de 4,9% à 5,5% en 2007, ce qui représente 1,4 million de personnes. Près d’un tiers des salariés ayant un emploi à temps partiel travaillent moins qu’ils ne le souhaiteraient. Les moins de 25 ans, plus touchés que leurs aînés par les formes d’emploi particulières, sont les premiers concernés : hommes et femmes confondus, plus de 41 % des jeunes à temps partiel souhaiteraient travailler davantage. Les secteurs où les salariés à temps partiel sont les plus nombreux sont les services aux particuliers (30,8 %), l’éducation, santé, action sociale (29,9 %), puis les services aux entreprises (22,4 %) et le commerce (19,4 %).

Un recul des créations de postes qui risque d’être durable

Plusieurs indicateurs laissent présager d’une dégradation durable de l’emploi : le recul de l’intérim et des CDD, les politiques engagées par le gouvernement et l’impact de la crise financière sur les activités productives.

Un net recul de l’intérim, indicateur des évolutions de l’emploi

La situation de l’intérim notamment est un indicateur des évolutions futures de l’emploi. Or, ce secteur subit un important recul depuis mars. Les carnets de commande des entreprises se dégarnissent (L’indicateur synthétique du climat des affaires se situe dorénavant huit points en dessous de sa moyenne de longue période et a atteint le niveau le plus bas depuis décembre 1993), provoquant d’abord des effets sur l’intérim (recul de 7,3% au deuxième trimestre avec une perte de 48 500 postes). Les effectifs intérimaires baissent particulièrement dans l’industrie (-9,7%, soit -29 500 postes), mais aussi dans la construction (-6,2%, soit -8 500) et dans le tertiaire (-4,8 %, soit -10 600). Le volume de travail temporaire, mesuré en équivalents emplois à temps plein, est également en baisse : -5,6 % au deuxième trimestre 2008. Depuis le début de l’année, l’emploi intérimaire a reculé de 11% selon l’Unedic (passant de 733 000 à 653 000).Ce sont ensuite les CDD qui subissent la dégradation de la conjoncture. De juin à août 2008 par rapport à 2007, les entrées à l’ANPE pour fin de mission d’intérim ont augmenté de 6,2% et pour fin de CDD de 1,4%. L’évolution des offres d’emploi déposées à l’ANPE reflète la dégradation de la conjoncture économique et de l’emploi. En effet, le ralentissement de la demande, notamment de consommation, conduit les entreprises à retarder les embauches, voir à annuler les offres d’emploi qu’elles déposent à l’ANPE. Elles ont diminué de 6,5% au mois d’août et de 4,2% sur un an. En données brutes (non corrigées des variations saisonnières), les offres d’emploi durables sont celles qui ont le plus reculé, de 15,5% sur un an. Les emplois temporaires ont également reculé, de 14,7%. Seuls les emplois occasionnels (moins d’un mois) ont connu une augmentation des offres, de 5,2%.

La responsabilité des politiques gouvernementales : l’impact de la défiscalisation des heures supplémentaires

Alors que l’économie entre en récession, le nombre d’heures supplémentaires a augmenté de 5,5% au deuxième trimestre par rapport au premier et de 34,5% sur un an. La croissance du nombre d’heures supplémentaires déclarées par salarié à temps complet est particulièrement élevée pour les salariés travaillant dans les PME, avec une croissance de 50,8% dans les entreprises de 10 à 49 salariés sur un an. Ces résultats reflètent à la fois les effets d’aubaine, c’est-à-dire la conversion en heures supplémentaires d’un travail anciennement normal afin de bénéficier des exonérations, avec des coûts importants pour les finances publiques, et la substitution des heures supplémentaires aux embauches. Dans un contexte d’incertitude forte et où les heures supplémentaires sont moins coûteuses que les embauches, un tel dispositif est véritablement porteur de chômage. Par ailleurs, le nombre de bénéficiaires d’emplois aidés dans le secteur non marchand a reculé de 42 000 au deuxième trimestre, après avoir baissé de 13 000 au trimestre précédent selon la DARES. La politique inscrite dans le PLF 2009 est complètement en contradiction avec la dégradation de l’emploi. Les crédits accordés au ministère de l’emploi sont en baisse de 5%, le nombre de contrats aidés va passer de 290 000 en 2008 à 230 000 prévus et 30 600 postes vont être supprimés dans la fonction publique.

Les difficultés du secteur productif et la multiplication des plans sociaux

L’absence totale de soutien à l’activité productive de la part du gouvernement amplifie l’impact de la crise financière sur le secteur productif et l’emploi. Le secteur automobile, touché de plein fouet par la crise économique, emploie, directement ou indirectement, 10% de la population active, soit près de 2,5 millions de personnes. Ces emplois se répartissent entre la construction automobile à proprement parler, avec 275.000 personnes à la fin 2007, selon des données du Comité des constructeurs français d’automobiles (CCFA), et l’activité auto au sens large: réseaux de concessionnaires, vente de carburant, construction de routes…Au niveau européen, le marché pourrait reculer de 9% en 2008 et les stocks s’accroissent. Les usines Renault vont fermer pendant deux semaines et Ford va fermer sa seule usine française pendant dix semaines. Le site emploie 1 100 salariés. Ford envisageait de fermer ce site d’ici avril 2010, ce qui occasionne des inquiétudes chez les salariés. PSA Peugeot Citroën a annoncé que la quasi-totalité de ses sites de production en Europe seraient affectés par des mesures de chômage partiel au quatrième trimestre pour réduire la production de 30% par rapport au programme prévu. Alors que le constructeur espérait une hausse de 5% de ses ventes mondiales en 2008, celles-ci devraient baisser d’environ 3,5%. Dans l’industrie lourde, des réductions d’activité ont également été annoncées. Trois ateliers de la plate-forme pétrochimique de Carling (Moselle), exploitée par Total Petrochemicals France (TPF), subiront ainsi un “arrêt conjoncturel” entre mi-novembre et mi-décembre, en raison d’une demande très faible et des stocks de produits finis très élevés. Selon l’enquête mensuelle de l’INSEE publiée jeudi, les entrepreneurs du bâtiment estiment que les créations d’emplois devraient fléchir au cours des trois prochains mois. La dégradation de la conjoncture affecte tous les secteurs, ce qui se traduit par des défaillances d’entreprises en hausse et des créations d’entreprises en baisse :

Séries des défaillances 2008

Janv.

Fév

Mars

Avril

Mai

Juin

Juil

3 562

3 599

5 872

3 940

4 171

4 112

4 333

Créations d’entreprises

Mai 08

Juin 08

Juillet 08

Août 08

Sept. 08

27 081

27 819

27 718

27 658

26 885

Le nombre de défaillances jugées au cours des douze derniers mois sous revue est en hausse par rapport aux douze mois précédents (+9,2 %) et de nombreux plans sociaux et fermetures de sites sont annoncés.


Plans sociaux annoncés depuis septembre

La Redoute : 672 emplois en 4 ans
ADECCO : 600 emplois d’ici 06/2009
Hewlett-Packard : 500 emplois
Sanofi-Aventis : 927 emplois
Altadis 1060 emplois
Crédit Agricole-Caylon 250 emplois
Renault : 4900 emplois
Free : 340 emplois
Tyco Electronics : 620 emplois
Camif : 980 emplois
Celeos : 247 emplois
Fonderie Helveticast : 91 emplois
Scania : 100 emplois
Ranger France : 447 emplois
Porcelaine de Sologne : 80 emplois
Kronenbourg : 214 emplois
Molex : 300 emplois
Moteirs Baudouin : 153 emplois
Texas instrument : 350 emplois

Soit 12831 suppressions d’emplois

Fermeture de sites de production :
US Molex (Vielmur sur Agout 81)
DIM (Autun 71) ⇒ délocalisation en Roumanie

Dépôt de bilan :
Camif (Niort 79)
Fonderie Helveticast (Angers 49)
Moteurs Baudouin (Marseille 13)

Arrêt de production (chômage technique) :
Renault : Dieppe-Sandouville-Choisy le Roy-Douai-Batilly-Villeeurbanne-Maubeuge-Le Mans-Flins
Sonas (équipementier) : Saint Nicolas d’Alermont-Beaucourt-La Souterraine
Ford : Blanquefort
PSA : Mulhouse-Sochaux-Hordain
General Motors : Strasbourg
Arcelor Mittal : Dunkerque-Montataire
Total : Carling
Liebherr-France : Colmar
Chantier de l’Atlantique : Saint Nazaire
Manitou : Ancenis
Paulstra : Segré
NTM Transmission : Allonnes
Hutchinson : Chalette sur Loing

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